Au-delà de la devise, vers un socle commun de valeurs pour le Bénin

 


La confiance est sans doute l’élément le plus précieux dans toute entreprise humaine. Sans elle, aucune réforme n’est durable, aucune politique n’est acceptée, et aucune nation ne peut véritablement s’élever. C’est fort de cette conviction que Laurent Jimaja, intellectuel béninois, poursuit sa série de réflexions partagées régulièrement sur ses réseaux sociaux, interpellant citoyens et dirigeants sur l’urgence de repenser les fondations mêmes de notre vivre-ensemble.

 

Jimaja nous rappelle que la mise en commun des forces pour avancer exige un cadre clair, un socle solide, que chacun accepte et défend. Au Bénin, ce socle a longtemps été résumé par la devise « Fraternité, Justice, Travail ». Mais, comme il le souligne de façon très lucide, cette devise, héritée du contexte d’indépendance, n’a pas fait l’objet d’une large appropriation populaire. Aujourd’hui, plus de soixante ans plus tard, il semble essentiel de s’interroger sur les valeurs qui nous rassemblent réellement et qui nous pousseraient à transcender nos différences.

 

Dans son propos, Jimaja met en avant trois valeurs cardinales : la fierté, la solidarité et la dignité. Des valeurs profondément ancrées dans les traditions africaines, au-delà des clivages sociaux, des origines ou du niveau d’instruction. À celles-ci, il ajoute la foi, cette force invisible qui relie le monde des vivants à celui des ancêtres, à ce Dieu suprême auprès duquel intercèdent divinités et esprits. Une foi qui irrigue la conscience collective et nourrit la résilience du peuple.

 

Mais la reconnaissance de ce socle n’est qu’un début. Il s’agit ensuite d’organiser la société autour de ces valeurs, de les traduire en actions concrètes. Jimaja insiste sur la nécessité d’une discipline collective et d’un sens aigu de l’organisation. Selon lui, c’est en acceptant humblement nos faiblesses et en sublimant nos atouts, même limités, que nous pouvons espérer rivaliser dans un monde où la concurrence est de plus en plus rude.

 

Il invite à sortir de la dépendance et de la posture victimaire : « Faire l’aumône froisserait la dignité », écrit-il, tout en rappelant que sans ressources minières, c’est par le travail et la créativité que le Bénin pourra tracer son propre chemin.

 

Ce plaidoyer de Jimaja est avant tout un appel à la lucidité et à la responsabilité. Il nous exhorte à ne pas confondre État et administration : l’État, porteur de souveraineté collective, ne saurait être réduit à une simple machine bureaucratique. Il incarne un projet de société, une volonté commune.

 

Dans un contexte pré-électoral où les débats se cristallisent autour de querelles de personnes et d’alliances fragiles, cette réflexion arrive comme une bouffée d’air frais. Elle rappelle que la grandeur d’une nation ne réside pas dans ses divisions, mais dans la conscience partagée de ce qu’elle veut défendre et construire ensemble.

 

Laurent Jimaja, par sa pensée claire et audacieuse, continue d’interpeller. Ses écrits devraient inspirer non seulement les décideurs politiques, mais aussi chaque citoyen épris d’avenir. Car plus qu’un discours, il propose un véritable projet de renaissance morale.

 

Voici, in extenso, la réflexion de Laurent Jimaja.

 

La confiance est à la base de tout développement et surtout de l’acceptation des citoyennes et des citoyens des mesures préconisées par l’État pour une mise en commun des forces pour aller de l’avant.

Pour ce faire, la définition ou la reconnaissance d’un socle commun est nécessaire. Quelles peuvent être les valeurs communes aux citoyennes et citoyens d’un pays ? Au Bénin, on peut se référer à la devise : Fraternité, Justice, Travail. Ceci a été défini dans des conditions d’accession à l’indépendance, certainement sans une consultation large de l’ensemble de la population. Plus de 60 ans après, il convient de se poser la question d’une ou d’autres valeurs que ce peuple compte défendre. La fierté, la solidarité et la dignité semblent des valeurs qui transcendent l’ensemble des aires culturelles africaines, mais interrogeons-nous pour plus de précision.

À propos de la devise, combien y a-t-il de personnes qui la connaissent et s’y réfèrent ? Par contre, la fierté, la solidarité et la dignité sont des valeurs que l’on peut dire cardinales, pour lesquelles on peut se battre, quelle que soit sa classe sociale, quel que soit son niveau d’instruction, quel que soit son lieu de naissance ou le nom que l’on porte. Et pour couronner le tout, il y a la foi inébranlable en l’existence d’un au-delà, un monde invisible où sont les anciens qui peuvent intercéder pour influencer le monde des vivants, tout comme il y a un dieu suprême auprès duquel intercèdent les différentes divinités : la foi. Telle est notre réalité !

Il nous faut une acceptation, une adhésion large et complète à ce socle commun pour enfin faire une nation.

 

Il est important ici aussi de nuancer, de préciser qu’il ne faut pas confondre l’État et l’administration. Le premier représente tout un chacun et dispose de nombreux pouvoirs pour prospérer, alors que le second constitue un outil, une structure de mise en œuvre des politiques à l’échelle du pays.


Une fois posé un cadre de valeurs, il faut s’organiser dans le but d’atteindre des objectifs. Pour ce faire, il faut être organisé et discipliné. C’est un choix à opérer assez vite, car c’est de lui que découle la réussite ou non des objectifs fixés. C’est, conscient de ses faiblesses, que l’on arrive à sublimer le peu de moyens et d’atouts que l’on a. Sans ressources minières, seuls le travail et l’imagination permettront de s’en sortir dans un monde de plus en plus féroce en termes de concurrence. Faire l’aumône froisserait la dignité.
LJ

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