Entre vacarme et silence : l’invitation des lucides à redéfinir la chose publique
Par-delà le
vacarme des ambitions et les rivalités de façade qui rythment désormais
l’horizon politique béninois, une voix s’élève, singulière et lucide, pour
appeler à une réappropriation noble de l’engagement public. Cette voix, celle
de Laurent Jimaja, nous exhorte non pas à désigner un futur président ou à
sonder les faveurs supposées du pouvoir en place, mais à refonder notre regard
sur ce qu’est, et surtout, sur ce que devrait être, la politique.
Le propos
est d’une justesse rare. Il refuse le spectacle convenu des positionnements
précoces, des clubs électoraux sans âme, des sigles vides de sens, des visages
connus dont la seule vocation semble être de persister dans la lumière. Ce que
dénonce Laurent Jimaja, c’est l’inanité d’un jeu où l’on confond la fin et les
moyens, où l’accession à un poste tient lieu de programme, et où l’intérêt
général s’efface sous le poids d’ambitions singulières.
En effet, faire
de la politique, rappelle-t-il en substance, ce n’est pas aspirer à diriger
pour le simple prestige du pouvoir. C’est porter le souci de l’autre,
s’inquiéter de la faim et de la soif des anonymes, s’interroger sur
l'effondrement du pouvoir d’achat dans les campagnes, sur l’angoisse
silencieuse de la ménagère et sur le désespoir muet des laissés-pour-compte.
La
politique, dans sa définition la plus noble, relève d’un acte éthique :
elle implique une orientation de la volonté vers le bien commun, et non une
stratégie de positionnement au service d’un curriculum vitae. Ce renversement
de perspective est devenu urgent. Il exige que chacun se livre à un examen
de conscience, que chacun consente à renaître intérieurement avant de
prétendre conduire les autres.
A travers
ses lignes, il note que le peuple béninois n’est pas dupe. Mais il est constamment distrait,
éloigné de ses véritables urgences par une rhétorique qui oppose mouvance et
opposition, comme si ces clivages, répétés à l’envi, suffisaient à structurer
une pensée politique digne de ce nom. Or, rien n’est plus vide que cette
dialectique si elle ne s’accompagne d’une vision, d’un projet, d’un cap
partagé.
À quoi bon
ces querelles stériles qui n’intéressent, au fond, qu’une poignée d’initiés ?
Que gagne la République à ces dénonciations théâtralisées ou à ces éloges
convenus d’une prétendue performance économique ? Dans cette grande mise en
scène, le citoyen reste spectateur, et la nation demeure orpheline d’un idéal.
Mais Laurent
Jimaja ne s’adresse pas uniquement à la classe politique. Il interpelle aussi,
et peut-être surtout, ces esprits éclairés, ces femmes et ces hommes de savoir,
de rigueur, d’honnêteté, qui, par pudeur ou dégoût, ont choisi de se tenir à
l’écart de l’arène. À ceux-là, il lance un appel solennel : « Installez-vous
fermement, hâtez-vous lentement mais sûrement, allez servir l’idéal de
prospérité des vôtres. »
Car il ne
suffit plus de penser juste. Il faut agir. Il ne suffit plus d’observer. Il
faut s’engager. L’heure est venue pour les consciences éveillées de se mettre
en mouvement, non pas pour conquérir le pouvoir, mais pour en restaurer le
sens.
Pour Jimaja,
il est des
moments où le silence des justes devient une forme de complicité. Le Bénin
traverse l’un de ces moments. La lucidité n’est plus une posture intellectuelle
: elle est une obligation morale. Et de cette lucidité doit naître une
espérance, non pas une espérance passive, mais une espérance agissante,
incarnée, vivante.
In fine, l’intervention
de Laurent Jimaja n’est pas une simple opinion. Elle est une interpellation
existentielle à l’endroit de toutes les générations. Elle nous rappelle que
la politique ne vaut que si elle est au service de l’humain. Et que l’Histoire
ne retient que ceux qui, dans l’épreuve du temps, ont eu le courage de
s’oublier pour édifier.
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